En janvier 2019, l’émission de France 3 Les Nouveaux Nomades consacrait un sujet au viaduc de Garabit, joyau architectural de la région dont sont issus mes ancêtres, les Chaudesaigues. Portrait d’une perle méconnue signée Gustave Eiffel.
Revoir le reportage des Nouveaux Nomades sur le viaduc de Garabit
Vous pouvez découvrir l’intégralité du sujet sur le site officiel de France TV (émission du samedi 5 janvier 2019 à partir de 5mn40) ou en découvrir un extrait sur la page Facebook de l’émission.
Prendre de la hauteur sur les terres d’origine des Chaudesaigues
Dans un billet publié sur mon blog l’été dernier et titré La source des Chaudesaigues, en hommage au Par, j’évoquais longuement les origines des membres de ma famille m’ayant légué leur patronyme. J’y dressais la liste des communes et régions arpentées par mes ancêtres, citant notamment Fridefont, les rives du Bès, et Mallet. Au sujet de cette dernière, j’écrivais :
Mallet, c’est aussi un viaduc unique en son genre : celui de Garabit, conçu par Gustave Eiffel lui-même. Son allure d’édifice frêle et élancé évoque une dentelle rouge et flotte au-dessus du val. Un joyau architectural qui me rend fier que le nom de Chaudesaigues (dont l’orthographe n’a pas changé depuis au moins 1630) soit associé à la région.
Des "Chroniques d’en haut" à quelques kilomètres de Chaudes-Aigues
C’est sur cette pépite que Laurent Guillaume s’est arrêté pour France 3 et Les Nouveaux Nomades. Pour ses Chroniques d’en haut, il a posé ses valises à Ruynes-en-Margeride, commune du Cantal située à 35 kilomètres de Chaudes-Aigues. Il y a rencontré Patricia Rochès, ambassadrice des Amis du viaduc de Garabit.
Des "Chroniques d’en haut" à quelques kilomètres de Chaudes-Aigues
Source : Google Maps
"En 1880, la construction du viaduc de Garabit fait la fierté de toute une région", introduit le reportage. "Il faut dire que pour son époque, c’est une performance : l’ouvrage devient le pont le plus haut du monde". Pour le site Cantal Destination, il est un "majestueux ouvrage de fer [qui] réunit les deux rives de la Truyère depuis plus de 130 ans et suscite l'admiration des vacanciers qui le découvrent en empruntant les routes qui sillonnent ces gorges aux attraits touristiques variés".
Ce défi, c’est l’un des ingénieurs et industriels les plus célèbres de l’histoire française qui l’a relevé : Gustave Eiffel. Pour France 3, "lui-seul pouvait imaginer comment traverser la profonde vallée de la Truyère". Pour l’auteur de la tour Eiffel mais aussi de la statue de la Liberté à New York, "l’enjeu est de taille en pleine révolution industrielle". En effet, on construit alors des lignes de chemin de fer partout en France et "le Massif central représente un obstacle colossal", rappelle Laurent Guillaume.
Dans ce coin de l’Auvergne, loin de la Ville-Lumière et de la Grosse Pomme, la signature Eiffel est pourtant évidente. "Avec cette structure, on se croirait sous la tour Eiffel", s’étonne l’animateur, appuyé par son hôtesse : "Exactement, c’est la même chose. Les croix de Saint-André sont vraiment typiques du style Eiffel : on le reconnait bien là".
On pourrait voir dans le viaduc de Garabit une pâle copie de la dame de fer parisienne – ce serait méconnaitre les dates, le pont ayant été réalisé non pas après, mais avant la tour. Une prouesse pour la fin du 19ème siècle, reconnue d’ailleurs au-delà des frontières de la région… et du continent. "On battait le record de hauteur détenu par les Américains à l’époque", s’enthousiasme Patricia Rochès. "On en a parlé jusque dans les journaux américains, en 1880. […] C’était vraiment quelque chose d’assez exceptionnel".
Exploit architectural, le viaduc de Garabit est aussi un ouvrage profondément humain. Derrière lui : un ingénieur lozérien, Léon Boyer, un constructeur, Gustave Eiffel, mais aussi et surtout des "centaines d’hommes courageux venus de tous les horizons", à qui Les Nouveaux Nomades rendent hommage. "Il faut monter plus haut encore pour prendre les dimensions de l’édifice, et penser avec respect à tous ces hommes du temps d’Eiffel qui bravaient les éléments, les saisons et tous les risques pour construire à la force de leurs bras, cette ébauche de tour Eiffel couchée entre deux montagnes", prévient le reportage. En 4 années seulement, ils ont œuvré mués par un seul objectif : permettre au train de passer.
"À une époque où les règles de sécurité n’étaient évidemment pas les mêmes qu’aujourd’hui", rappelle Laurent Guillaume, ces hommes "avaient du courage" mais "n’avaient pas le choix non plus : il fallait travailler qu’il pleuve, qu’il neige ou qu’il vente". Au total, la région déplorera 4 accidents mortels, même pas répertoriés dans les archives de la société Eiffel. "À l’époque, on n’avait pas à tenir ce genre de registres : il s’agit de témoignages qui ont été recueillis et qu’on a retrouvés sur des journaux d’époque", explique Patricia Rochès.
Au rang de ces ouvriers "de l’extrême" combinant compétence, connaissance du terrain et résistance au vertige, "il y avait des étrangers : 200 Italiens venus travailler sur ce chantier, en particulier sur la taille de pierre, principalement sur les assises en granit". Aux côtés de ces camarades transalpins, il y avait aussi et bien sûr des Cantaliens, "des gens du pays".
Le sujet se conclue sur quelques mots délivrés par Laurent Guillaume, hommage tout à la fois au progrès et à la tradition, au rapprochement des peuples et à la renaissance :
Moins connu que la tour parisienne, le viaduc de Garabit n’en demeure pas moins, pour beaucoup, le plus fort ouvrage de son créateur. Je reste touché par cette histoire de franchissement, par le train, mais je suis surtout sensible à l’immense bras tendu de cette arche de fer. Une main à saisir entre deux rives par des hommes restés séparés pendant des siècles à cause des gorges abruptes de la Truyère. C’est aussi ça, Garabit : un pont qui appelle aux retrouvailles, comme après un naufrage.