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Par Pierrick Delobelle
Un organisateur amer, une municipalité embarrassée, et un chef étoilé pas très à l’aise… L’ambiance est quelque peu tendue dans la cité thermale de Chaudes-Aigues et ses 900 âmes, suite à l’annulation de l’édition 2015 du festival du tatouage. Stéphane Chaudesaigues, organisateur de l’événement, dénonce un manque de soutiens, d’espaces et de concertation dans l’organisation du Cantal In’k the Skin. De plus, l’ancienne école privée exploitée durant le festival que souhaitait racheter l’organisateur a été vendue au cuisinier étoilé, Serge Vieira.
Au début du mois de juillet à Chaudes-Aigues et ce depuis deux ans, tatoueurs, tatoués, curieux et badauds se sont rendus par milliers au festival du tatouage organisé par Stéphane Chaudesaigues, rendez-vous qui aurait attiré 22.000 personnes et engendré 1,2 millions d’euros de retombées économiques.
« J’ai essayé d’acheter l’école pour sauver le festival »
Mais la semaine dernière, la nouvelle est tombée, le festival n’aura pas lieu cette année : « beaucoup d’argent a été investi mais on peut pas faire l’édition 2015, principalement pour un manque de surface que l’on a perdu en nous enlevant la cour de l’école, soit mille personnes en moins. De plus la SACEM nous réclame de l’argent », explique Stéphane Chaudesaigues qui précise avoir fait une offre d’achat de l’école privée exploitée lors de l’événement : « j’ai essayé d’acheter l’école pour sauver le festival. C’était un achat de raison, pas de cœur. On voulait investir les étages pour cinquante pros de plus. Techniquement on ne peut pas accueillir plus de 140 professionnels et nous avons plus de 280 demandes. L’équilibre du budget sur la troisième édition pouvait se faire ».
Suite à cette annonce, les commerçants réagissent, à l’image des propos de la patronne de « Chez Biche » : « c’est une grosse déception. Durant le festival, le pays change complètement de visage, J’espère que c’est juste une mauvaise passe », ou ceux de celui qui tient le commerce « Chris Pizza » : « la porte est entre ouverte », observe-t-il. La direction de l’hôtel Beauséjour insiste : « j’ai été très déçu de cette décision, ça nous a fait un gros coup derrière la tête. Début juillet, l’économie de Chaudes-Aigues est au ralenti, cette semaine était fantastique ».
Spectacles, concours, conférences, en deux années d’existence le festival du tatouage a pris une ampleur importante dans le paysage événementiel du Cantal, mais après la seconde édition, l’organisateur a tiré la sonnette d’alarme concernant la mise en place du troisième festival : « au mois d’octobre j’ai tout posé à plat et j’ai proposé une journée de plus. Des milliers de personnes allaient consommer plus. La municipalité a dénoncé le surcoût des navettes qu’elle prend en charge, pour une journée supplémentaire, alors que cela coûte 3 000 euros ».
Amer, Stéphane Chaudesaigues regrette un manque de soutien : « là je suis en asphyxie, le poisson est sorti du bocal et on en peux plus. Je ne jette pas la pierre au maire mais je pense qu’il n’a pas pris la mesure de ce que l’événement apporte au village et le travail nécessaire ».
Le maire du village, sollicité par les habitants et les commerçants de la commune affirme : « je pense que c’est une annonce un peu prématurée. Le conseil municipal et moi-même sommes favorables à l’organisation du festival. J’ai l’impression qu’il veut nous faire endosser l’annulation. On ne peut pas faire plus. On prête notre logistique et on paye les navettes », avant d’aborder le sujet du moment, la vente de l’ancienne école privée : « je pense que Stéphane Chaudesaigues s’est senti un peu vexé concernant le projet immobilier qui ne s’est pas fait. La situation financière de la commune ne nous permettait pas d’acheter cette école. Nous avons un village touristique, familial, où tout est à reconstruire. Maintenant il y a peut-être la possibilité de trouver un arrangement avec le nouvel acquéreur ? ».
Serge Vieira rachète l’école : « il n’y a pas de polémique »
Le nom du nouvel acquéreur est également un sujet qui alimente les discussions actuellement à Chaudes-Aigues, puisque c’est le chef étoilé du château du Couffour, Serge Vieira qui avait des vues sur la bâtisse depuis trois ans et demi. « C’est bien nous qui avons acheté le bâtiment. On a fait cet achat sans savoir qui était derrière. Je suis partenaire depuis le début et il n’y a pas d’animosité entre Stéphane et nous, c’est facile de nous mettre les uns contre les autres mais Stéphane est plus intelligent que ça ! », dit-il en mettant fin à tous les « on-dit ».
« Il n’y a pas de polémique, nous sommes là depuis six ans et employons 22 salariés. En parallèle de notre projet d’hôtel 4 étoiles et du bistrot dans le village nous allons certainement, dans ce bâtiment, proposer des logements pour notre staff », affirme celui qui se voit reconduire ses deux étoiles au prestigieux guide Michelin.
« C’est peut-être une petite cause mais je crois que ce n’est pas ça qui supprime le festival. Tout est possible et envisageable. Ce festival est une très bonne chose pour notre village et notre région. C’est très dur pour deux personnes de porter un tel événement », observe Serge Vieira qui affiche un soutien complet au festival du tatouage : « pour ma part, il me semblerait judicieux de faire ce festival tous les deux ans pour appréhender son organisation. C’est mon point de vue, je l’ai déjà évoqué. Nous sommes un partenaire important du festival et nous le soutiendrons encore ».